La création "Charla Banjara"
En janvier 2019, Le Chantier de Correns accueillait en résidence de création l'équipe du spectacle « Charla Banjara », qui signifie « conversation gitane ». C’est l’association du mot espagnol charla et du mot hindi banjara qui nomme le peuple gitan dans le Nord de l’Inde.
Dans cette création, c'est bien d'un dialogue entre cultures orientales, indiennes et gitanes qu’il s’agit. La musique classique persane y converse avec le cante jondo flamenco et les chants populaires kalbeliya des gitans du Rajasthan.
La transe soufie y côtoie le duende. La danse se combine à la musique et au chant. L'improvisation y est maîtresse du jeu. Une symbiose sous le signe du féminin portée par la fougue de deux artistes généreuses, Maria Robin et La Fabia, qui sont accompagnées par Shadi Fathi, brillante soliste de musique persane et Jésus de la Manuela, cantaor gitan à la voix de feu.
Quelques grands noms du Flamenco
CANTAORES/CANTAORAS (CHANTEURS/CHANTEUSES DE FLAMENCO) - première partie
- Antonio Chacon (1863-1929). Le Cantaor le plus important de l’histoire. Domina tous les genres et les fit évoluer. Spécialiste des malaguenas et des cantes du Levant.
- Manuel Torre (Cadix, 1878-1933). Cantaor le plus grand de l’histoire du genre, considéré comme un mythe. Exceptionnel dans le cante gitan de Jerez.
- Jacinto de Almadén (1899 - 1968). Figure des tablaos de Madrid avec Don Antonio Chacon. Spécialiste des cantes du Levant.
- La Niña de los Peines (1890-1969). Sa voix a été déclarée « Bien d’intérêt culturel » par le Gouvernement d’Andalousie en 1996. Cantaora la plus complète de son époque sublime avec ses peteneras, tangos, bamberas.
- Manolo Caracol (1909-1973). Un des cantaores parmi les plus célèbres du XXe siècle. Brillant dans la siguiriya, le fandango, les bulerias.
- Pepe de la Matrona (1887-1980). Cantaor remarquable de l’âge d’or du flamenco, caractérisé par la pureté de son style traditionnel griffé quartier gitan de Triana. A réalisé un remarquable travail de recherche et de divulgation de cantes.
- Fernando Terremoto (1934-1981). Ce gitan de Jerez à la voix brisée, au duende unique, fut un improvisateur exceptionnel.
- Antonio Mairena (Séville 1909-1983). Patriarche du cante contemporain, il a effectué un colossal travail de recherche.
- Camaron de la Isla (1950-1992). Cantaor considéré comme une des principales figures du flamenco moderne.
- El Chocolate (1931- 2005). Particulièrement brillant dans les seguiriyas, les martinetes, les soleares.
CANTAORES/CANTAORAS - deuxième partie
- Chano Lobato (Cadix, 1927-2009). Spécialiste de cantes pour la danse. Chante surtout des cantinas, des tangos, des tanguillos, des malaguenas.
- Enrique Morente (Grenade 1942-2010). Compositeur et chanteur de flamenco moderne des plus influents, père d’Estrella Morente. Grand rénovateur.
- Manuel Agujetas (1939-2015). Gitan, sa voix pathétique, évoque celle de Manuel Torre. Spécialiste des siguiriyas et des cantes a palo seco.
- El Lebrijano (1941-2016). Voix chaude et sonore, a intégré les influences arabes et andalusi dans son chant. Grand connaisseur de tous les styles.
- El Cabrero (Séville, 1944). Textes chargés de protestation sociale. Célèbre pour ses fandangos.
- Carmen Linares (Jaén, 1951). Légende du flamenco au vaste répertoire. Voix délicate et doloriste.
- Duquende (Sabadell, 1965). D’origine gitane, il commence sa carrière avec Camarón de la Isla et sera ensuite accompagné par les plus grands guitaristes tels Tomatito, Paco de Lucía ou Vicente Amigo.
- José Merce (Cadix, 1955). Domine tous les styles. Cante aux échos anciens dans la grande tradition flamenca.
- Estrella Morente (1980). Cantaora et bailaora, fille d’Enrique Morente, une des chanteuses de flamenco les plus connues.
- Rocío Márquez (Huelva 1985). Cantaora engagée à la voix cristalline, assez rare en flamenco.
TOQUE (JEU OU MUSIQUE), Guitare et palmas
- Ramon Montoya (1879-1949). Une des grandes figures de la guitare qui accompagnait Chacon.
- Sabicas (1912-1990). Technique remarquable, un des guitaristes parmi les plus reconnus de la seconde moitié du XXe siècle.
- Pedro Bacán (1951-1997). Cousin d’El Lebrijano. Frère de la cantaora Inés Bacán, guitariste très technique et compositeur.
- Paco de Lucia (1947- 2014). Considéré comme le plus grand guitariste et compositeur de flamenco de l’époque contemporaine, il a donné à ce dernier une audience mondiale et contribué à l’ouvrir à d'autres types de musiques.
- Pepe Habichuela (1944). Guitariste parmi les plus saillants de l’époque contemporaine.
- Chico Moraito (1956). Appartenant à l’école de Jerez, un des meilleurs guitaristes des nouvelles générations.
- Tomatito (Alméria, 1958). Guitariste et compositeur, il a joué avec Paco de Lucía et accompagné le chanteur Camarón de la Isla pendant les dix-huit dernières années de celui-ci.
- Chano Domínguez (Cadix, 1960). Pianiste de jazz fusion et de nouveau flamenco.
- Juan Carmona (Lyon, 1963). Guitariste et compositeur, inspirateur du Nouveau flamenco et du flamenco-fusion.
- Vicente Amigo (Cordoue, 1967). Guitariste et compositeur original multi-primé, considéré comme un virtuose de la guitare flamenca.
BAILAORES/BAILAORAS (DANSEURS/DANSEUSES DE FLAMENCO)
- Carmen Amaya (1918-1963). Bailaora, cantaora et actrice gitane, mondialement connue par ses films. Anticonformiste, a émancipé la danse espagnole de son maniérisme.
- Farruco (1935-1997). Patriarche d'une famille flamenca, grande figure du baile de la seconde moitié du XXe siècle.
- Antonio Gades, (1936-2004). Danseur et chorégraphe, un des plus importants de l’époque contemporaine.
- Cristina Hoyos (Séville 1946). Danseuse, chorégraphe, professeure, directrice de compagnie et actrice.
- Antonio Canales (Séville 1961). Danseur, chorégraphe, acteur (notamment pour Tony Gatlif dans Vengo).
- Antonio Canales (Séville, 1962). Danseur et chorégraphe. Grande technique et esprit novateur.
- Belén Maya (1966). Danseuse, chorégraphe et éducatrice de flamenco.
- Israel Galván (Séville 1973). Danseur et chorégraphe du flamenco expérimental.
- Farruquito (Seville, 1982). Bailaor, héritier d’un style et d’une école de danse fondés par son grand-père, El Farruco, le plus grand bailaor gitan du XXe siècle.
Focus sur Gulabi Sapera, danseuse rajasthani

Gulabi Sapera : danseuse gitane du Rajasthan ...
Livre | Robin, Thierry (1957-....). Auteur | 2000
Ce livre-disque est le récit autobiographique de Gulabi Sapera, danseuse gitane du Rajasthan, issue de la caste des Kalbeliyas (ou Saperas), communauté nomade des charmeurs de serpents. Ce récit est superbement illustré par les ph...
Le flamenco, l’Andalousie et les gitans
Avant d’atteindre l’universalité confirmée par le label « patrimoine culturel immatériel de l’humanité » obtenu en 2010, le flamenco a été l’expression artistique d’une région bien précise d’Espagne : l’Andalousie (cf.en bleue dans la carte ci bas). Ensuite, à l'époque de l'Espagne musulmane, l'Andalousie fut la première (en 712) et la dernière (en 1492) région d'Espagne à être occupée par les musulmans. Elle formait la plus grande partie du califat de Cordoue. En Andalousie on parle surtout dans le dialecte andalou, une façon de parler le castillan. L'andalou a beaucoup de termes arabes et d'autres langues.
Le flamenco est un genre musical et une danse datant du XVIIIe siècle, qui se danse seul, créé par le peuple andalou, sur la base d'un folklore populaire issu des diverses cultures qui s'épanouiront au long des siècles en Andalousie. À l'origine, le flamenco consistait en un simple cante (chant) a cappella. Les claquements des mains pour accompagner ce chant s'appellent palmas. En plus des palmas, la percussion se fait souvent avec les pieds : taconeos. Les mains et les doigts proposent aussi des figures très travaillées et expressives appelées floreos. Les mélodies du flamenco se sont enrichies des influences musicales arabes, juives et gitanes.
Comme explique le musicologue José Blas Vega :
"Les Gitans et les paysans furent les principaux interprètes du cante flamenco, car la société cultivée le méprisait, le considérant comme affaire de « petites gens ». Cette attitude favorisa le contact entre les Gitans et le peuple andalou. Vers 1850, le cante alimente le spectacle des cabarets chantants (cafés cantantes) qui se créent à Séville, Xérès, Cadix, Málaga et divers villes et villages andalous."
La présence des gitans est l’élément de base de cet art. A partir du XVe siècle et ce, jusqu’à la deuxième moitié du XVIIIe siècle, les gitans ont vécu en Espagne, persécutés par l’Inquisition. Cependant, à partir du XVIIIe siècle, ils commencent à conquérir une forme de liberté (conditionnelle) et plus particulièrement lorsque leur art commence à se mêler avec les chants et danses de l’Andalousie de l’époque (y régnaient alors le boléro, le fandango, la seguidilla ainsi que des danses folkloriques). Le flamenco se constitue alors comme un art à part entière où trois elements se combinent : el baile, el cante y el toque (la danse, le chant et la guitare).
⇒ Le flamenco andalou inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité UNESCO
⇒ Parcours historique et géographique du flamenco - Philharmonie de Paris
Les danses et chants populaires Kalbeliya du Rajasthan
Kalbeliya désigne un peuple du Rajasthan, un état du nord-ouest de l’Inde ; les Kalbeliya sont réputés pour leur nomadisme dans les différents districts de l'Inde. Ce peuple est célèbre pour ses danses et ses chants qui font partie intégrante de son folklore.
C'est une population composée de marginaux, qui vivent à la périphérie des villages, dans des camps de fortune appelés deras. Les hommes jadis étaient des charmeurs de serpents, ils transportaient leurs cobras dans des paniers cane, en allant de porte à porte. Ils vénéraient le cobra en préconisant de ne surtout pas le tuer, même si le reptile était entré par inadvertance dans une maison. Dans ce cas, il convenait d'appeler un Kalbeliya pour rattraper l'animal, sans le tuer. Ainsi, les mouvements de danse et les costumes de leur communauté ressemblent à ceux des serpents.
Les danseurs sont des femmes en jupes noires qui dansent et tourbillonnent, reproduisant les mouvements d'un serpent. Le tissu du haut du corps est appelé Angrakhi et un morceau de tissu porté sur la tête, appelé Odhani, est également appelé Lengha. Tous ces tissus sont mélangés dans des tons rouges et noirs et brodés de telle manière que lorsque ces danseurs exécutent ces vêtements représentent une combinaison de couleurs apaisantes pour les yeux ainsi que pour l'atmosphère.
⇒Pour en savoir plus sur les danses Kalbeliya
Une des danseuses qui ont majeurement contribué à faire connaitre au grand public les danses et la culture Kalbeliya est Gulabi Sapera
Son histoire est recueillie par le musicien Titi Robin dans un livre-disque qui présente un récit autobiographique :
Gulabi, qui a appris à danser en même temps qu'à marcher, raconte ses difficultés à s'imposer comme danseuse dans un cadre traditionnel rigide, sa détermination, et les débuts desa renommée internationale. Le disque présente une palette du répertoire kalbeliya : chants de mariage, chants de séduction ou encore des airs à charmer les serpents. Ici, Gulabi et ses danseuses remplacent les reptiles et chantent intensément, soutenues par les rythmes énergiques des joueurs de daf et de dhaphlis (tambours sur cadre)et par le son envoûtant du punghi(flûte-cornemuse des charmeurs de serpents). Un harmonium accompagne Gulabi sur quelques titres à la façon de la musique soufie indo-pakistanaise.Gulabi Sapera et Titi Robin ont un sodalice musicale qui dure depuis 1992. Elle est fréquemment l’invitée des spectacles de Titi et la chanson Pundela issue du disque "Gitans", comme La Rose de Jaipur, de l’album "Un ciel de cuivre", montrent à quel point la rencontre entre ces deux artistes suscite l’émotion. En 2002 sort un opus qu’ils cosignent : « Rakhî » consacré au mariage de leurs univers respectifs, sur la base de chansons de la caste des Kalbeliyas ou du répertoire Marwari, issus du désert du Thar. Un spectacle où sa chorégraphie et les compositions de Titi Robin s’assemblent a vu le jour en septembre 2002, « Jivula ». En 2006 sont produits le DVD Jivula et le CD Anita ! (Madoro Music/Naïve) contenant plusieurs films documentaires réalisés par Sergio Mondelo et présentant l’univers de Titi Robin, à partir d’un voyage andalou sur la tombe de Camarón de la Isla, mêlant interviews et images d’archives, extraits de musique sur scènes et en famille, la création musique et danse de Titi Robin et Gulabi Sapera, filmés en Inde ainsi qu’en France. (texte issu du site de Titi Robin)
Les disques de Titi Robin avec Gulabi Sapera
- Gitans, Silex/Naïve, 1993
Un ciel de cuivre, Naïve, 2000.
Rakhi, Naïve, 2002.
Anita Naïve, 2006
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